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LE LIVRE DU MOIS : L’ETERNITÉ REÇUE DE MARTIN STEFFENS

  • PAROISSE DE MARTIGUES
LE LIVRE DU MOIS : L’ETERNITÉ REÇUE DE MARTIN STEFFENS

Martin Steffens aborde le sujet difficile de la mort, porté par la conviction que l’obsession de la mort et de la vie empêche de s’ouvrir au réel.

 

Âgé de quarante ans, professeur en khâgne à Metz, Martin Steffens a écrit depuis quelques années plusieurs livres qui lui ont attiré un public certain, son Petit traité de la joie – Consentir à la vie lui ayant d’ailleurs valu le prix « Humanisme chrétien » en 2013. Ses chroniques régulières dans La Croix ou La Vie sont également appréciées.

 

Dans ce dernier ouvrage, il ose aborder un thème difficile, celui de la mort et, ma foi, il s’en tire plutôt bien. Au début, il exclut aussi bien la résignation de ce qu’il appelle les « sagesses de camomille » que les « deux conduites qui, à la fois, ne nient pas la mort et affirment son impossibilité (…) : d’une part l’insurrection tragique, de l’autre le resurgissement mystique. Œdipe et Orphée. La lutte désespérée ou la supplication contra spem in spe. »

Des « petites morts » annonciatrices de la mort finale

 

L’itinéraire de notre philosophe, pas forcément très original, est alors donné clairement par les titres de ses quatre chapitres : « Vivre d’abord », « Mourir parfois », « Mourir », « Ressusciter ». Si l’on suit cette progression, on voit que, même dans toute vie pleinement vécue, il y a des ‘petites morts’, annonciatrices de la mort finale, si j’ose dire. Quel est alors le sens de ces étapes préalables ? « Comprendre petit à petit, et sans laisser la mort empoisonner la source de la vie, que l’entrée du désir dans le réel est certes pour lui une blessure, mais qu’elle est aussi, en même temps, a blessing(c’est-à-dire ‘une bénédiction’). C’est cette nouvelle amplitude de la vie que vise Blaise Pascal quand il demande à Dieu ‘le bon usage des maladies’. »

 

Le chapitre « Mourir », lui, offre une méditation profonde sur la mort mais aussi sur le mal, sur la prière ou sur l’amitié. Citant Maître Eckhart, il lie la mort avec l’amour de belle façon : « Si donc, d’une part, aimer c’est laisser être une chose pour elle, ou bien savoir que la jouissance que j’ai d’elle ne m’est jamais ni acquise, ni due ; si, d’autre part, mourir c’est être empêché de toute jouissance et laisser le monde aller sans moi ; alors peut-être y a-t-il un lien entre l’amour et cette mort ultime qui nous enlèvera tout » ! Ensuite, continue Steffens, « la mort, en nous assignant à la plus parfaite impuissance, nous confie à une aide qui, ou bien n’est pas, ou bien est absolue ».

L’irréversibilité de la vie et son éternité

 

Le second cas ouvre vers le dernier chapitre qui aborde l’espérance, centrale pour le christianisme, en la résurrection. Laquelle ne fait pas l’économie de l’épreuve d’un jugement sur lequel notre auteur insiste. Pour autant, pareille perspective ne doit ni effrayer le chrétien, ni le démobiliser de ses tâches terrestres. « On n’a qu’une vie, et elle est éternelle. Il faut tenir les deux : l’irréversibilité de la vie et son éternité. Si l’on ne garde que la première proposition, on se retrouve avec cet appel angoissé à tirer profit de la vie, dans le labeur excessif ou la jouissance sans entrave. Mais il n’est pas meilleur d’oublier l’urgence de vivre cette vie : car confesser la vie éternelle aura longtemps permis de s’accommoder de l’injustice et du malheur. Beaucoup de chrétiens remirent à l’au-delà la fureur de vivre dont on a besoin pour faire un peuple de saints. Cette vie, il faut la tenter tout entière, non par craindre de la perdre bientôt, mais parce que, promise à l’éternité, rien n’est à perdre, tout est à gagner » !

 

La Croix

LE LIVRE DU MOIS : L’ETERNITÉ REÇUE DE MARTIN STEFFENS
F
Simone Weil, pardon
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F
Dans votre article, vous avez oublié de mentionner que tout au long du livre, il cite principalement Simone Weill.<br /> Cela dit, c'est un livre que je relirai pour approfondir. Vraiment très intéressant.
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T
C'est vrai que j'ai oublié de mentionner que Martin Steffens étant un spécialiste de Simone Weil, il la cite abondamment. Mais comme cette recension date de plusieurs mois je ne me souviens pas pourquoi je ne l'ai pas mentionné. Ceci dit je dirai qu'il serait encore à conseiller pendant ce temps de Carême. Reste à vous souhaiter de le relire .... et à l'approfondir. Bonne lecture car vous êtes en bonne compagnie avec ce livre !
T
L’éternité reçue : on pourrait penser qu’avec un tel titre l’auteur nous donnerait un manuel pour réussir une belle mort ou se préparer à mourir. Mais en y pénétrant plus en profondeur on s’aperçoit qu’il s’agit bien plutôt d’un hymne à la vie, une vie reçue qu’il faut vivre hic et nunc, ici et maintenant ; il faudra certes quitter cette vie d’ici-bas mais pour recevoir l’Eternité de la main d’un autre, de la main même de Dieu.<br /> <br /> « Je ne meurs pas, j’entre dans la vie ! » disait sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus au moment de sa mort. Telle aurait pu être aussi la conclusion de cet ouvrage loin d’être triste parce que l’Espérance en est le moteur.
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T
Le premier chapitre peut parfois surprendre quand l'auteur parle de la façon d'envisager la mort,parfois à rebours de certains disccours mais - quoique parfois difficile - il contient de très bons arguments contre ceux qui nous parlent de "choisir sa mort" ou du "droit à mourir quand on veut et comme on veut" ! De nombreuses références à des auteurs chrétiens ou non sont une bonne façon de faire réfléchir sur une réalité de la vie que l'on préfère ignorer. Finalement un bon livre à conseiller !
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