IL SUFFIT D’AIMER !
-
Ce dimanche 4 mai, le cardinal Jean-Marc Aveline, titulaire de l’église Santa Maria ai Monti, a présidé l’eucharistie dans sa paroisse romaine. Dans son homélie, il a commenté le passage d’Évangile : « Pierre, m’aimes-tu ? »
Ce matin-là, pendant qu’ils étaient partis pêcher, Jésus vint sur le rivage, près d’un petit feu de braise, que l’évangéliste désigne avec délicatesse par le même mot, anthrakia, que celui par lequel il avait désigné le feu où se chauffait Pierre lors de son reniement. Dans le récit de Jean, on ne trouve, à la différence des autres évangélistes, cet échange de regard qui assure Pierre du pardon : ici, il porte encore le poids de sa trahison. Jésus demande aux disciples s’ils ont un peu de poisson. Mais ils ont passé la nuit sans rien prendre. Il leur dit alors de jeter le filet tout près de la barque et le filet se remplit. Jean comprend le premier que c’est le Seigneur. Il le dit à Pierre, qui se jette à l’eau. Il n’est pas le premier à comprendre mais, le premier, il prend la responsabilité.
« Plus tard, tu comprendras », avait dit Jésus à Pierre en lui lavant les pieds, mais le lendemain, pris de panique par la tournure des événements, Pierre avait préféré faire semblant de ne pas connaître Jésus, et il l’avait renié, par crainte d’être lui aussi condamné. Que ce fardeau est lourd sur les épaules de Pierre ! Maintenant, sur ce rivage à l’aube d’un jour nouveau, le cœur inondé de miséricorde et de joie, Pierre a enfin compris ! Il a compris que pour comprendre, il suffit d’aimer et d’accepter d’être aimé, alors même que l’on sait tous nos manques d’amour. Le récit, discrètement, ne nous dit pas ce qui se passe alors, mais on devine que le feu de braise du reniement est désormais remplacé par un autre feu, celui d’une intime et puissante réconciliation, où l’humilité du pécheur repenti est embrasée par la bonté sans mesure du pardon.
Voilà ce qu’est Pâques, frères et sœurs : un événement d’amour qui nous dépasse et cependant nous requiert ; un événement inouï qui nous transforme au plus intime de nous-mêmes ; une joie qui n’a pas d’autre fondement que l’amour et qu’on ne peut comprendre que par amour. « L’amour seul est digne de foi » ! La seule question décisive, posée trois fois par Jésus à Pierre autour du feu de braise, fut celle-ci : « Pierre, m’aimes-tu ? » (Jn 21, 15-17). Et c’est la question de tous les matins de Pâques, celle que Jésus nous pose chaque jour, et aujourd’hui encore, pour nous entraîner avec lui dans la Vie et faire brûler en nos cœurs la « vive flamme d’amour » de son Évangile, comme le disait saint Jean de la Croix.
Charles de Foucauld disait que la grande force que nous donne le Christ ressuscité est de ne pas avoir peur ! N’ayons pas peur de la vérité : elle nous rendra libres ! N’ayons pas peur des autres qui sont différents, puisque tout homme, toute femme, est un frère, une sœur, pour qui le Christ est mort. N’ayons pas peur de nous engager à la suite du Christ et d’annoncer l’Évangile, par l’humble témoignage de nos vies, par l’amour et le respect des plus faibles, de la naissance jusqu’à la mort. Oui, chers amis, Christ est ressuscité ! Pour le suivre, il suffit d’aimer et d’accepter humblement d’être aimé, pardonné, relevé, sauvé, par Celui qui n’est qu’Amour !
Alleluia ! Amen !
+ Jean-Marc Cardinal Aveline