LE PAIN DE VIE POUR TOUS LES HOMMES
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La multiplication des Pains, aucune scène ne nous est plus familière que Jésus assis au milieu de ses disciples, "Jésus prit les pains, et ayant rendu grâce , il les distribua aux convives, de même que les poissons autant qu’ils en voulaient".
Matthieu, Marc, Luc et Jean, chacun à sa manière a raconté cet épisode de la vie du Christ.
Pour Jean, il concentre son regard sur la personne de Jésus.
Jésus voie la "foule nombreuse". Il prend l’initiative d’interpeller Philippe, car précise Jean pour souligner la Seigneurie de Jésus, lui- même savait bien ce qu’il allait faire. C’est encore lui qui donne l’ordre de faire asseoir les gens et qui, contre toute vraisemblance pratique, distribue les pains après les avoir multipliés. C’est lui, enfin que la foule recherche pour le faire roi et qui s’enfuit tout seul dans la montagne.
Derrière le miracle il y a le signe des pains : Jésus rassasiant toutes les faims. Il rassemble le peuple de Dieu, il l’organise, les douze sont très présents dans cette scène, mais ce qui est surtout suggéré c’est son autorité calme et puissante, son ascendant.
Le parti adopté par Jean de concentrer le regard sur la personne de Jésus, va avoir pour effet de souligner encore le malentendu qui se creuse entre lui et la foule rassasiée. Les Juifs attendent pour les derniers temps le renouvellement de la manne. Aussi, "à la vue du signe que Jésus accomplit" s’enthousiasment-t-ils et saluent en lui "Le Grand Prophète" semblable à Moïse, qui devait venir. Mais au lieu de s’ouvrir, dans la Foi, à celui que le miracle signifie, la foule s’arrête au pain dont elle a été nourrie ; elle tente même d’enfermer Jésus dans l’idée préconçue et fausse qu’elle se fait du Messie : "Ils étaient sur le point de venir le prendre de force et faire de lui leur roi." C’est le pain qui les intéresse et non le Messie qui donne le pain.
Aussi Jésus se dérobe-t-il. En se retirant, "tout seul dans la montagne" et en déjouant ainsi les intentions récupératrices de la foule, il nous place face à un Dieu dont les voies ne sont pas les voies de l’homme. S’il se montre attentif à nos besoins, s’il part de notre indigence et de notre faim, c’est pour nous ouvrir à une réalité que nous ne soupçonnions pas.
C’est bien au secret personnel de Jésus que doit nous conduire, ce signe des pains. Encore faut-il que nous acceptions d’être déconcertés par son mystère au lieu de vouloir le ramener à ce que nous connaissions déjà ou aux limites de nos espoirs et de nos attentes (faire de lui leur roi). Quand ils sera de nouveau question de la royauté de Jésus ce sera durant son procès : Ma royauté n’est pas de ce monde, dira-t-il à Pilate. Et c’est sur la croix que paradoxalement le gouverneur romain la proclamera, en vérité, par l’inscription : Jésus le Nazaréen, le roi des Juifs.
Il y a des gestes de Jésus : comme il le fera au soir de la Cène, dans le récit de l’Institution Jésus " prend les pains, et, après avoir rendu grâce, les distribue".
Il y a toutes ces expressions qui appartiennent au Rituel Eucharistique : recueillir, morceaux,
Quand la foule fut repue, Jésus dit à ses disciples : "Rassemblez les morceaux ou surplus, afin que rien ne se perde".
Ce jour-là Jésus n’a pas seulement rompu le pain pour une foule, mais pour tous les hommes. Et c’est ainsi, que dans les douze corbeilles, nous puisons encore à chacune de nos Eucharisties, le pain consacré par le Prêtre.