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SUR LE SYSTÈME ÉCONOMIQUE ET FINANCIER ACTUEL (17)

  • PAROISSE DE MARTIGUES
SUR LE SYSTÈME ÉCONOMIQUE ET FINANCIER ACTUEL (17)

23. Chaque entreprise constitue un important réseau de relations et, à sa manière, elle représente un véritable corps social intermédiaire avec sa culture propre et ses pratiques. Celles-ci, tout en déterminant l’organisation interne de l’entreprise, affectent également le tissu social au sein duquel elle opère. À ce sujet, l’Église attire justement l’attention sur l’importance d’une responsabilité sociale de l’entreprise, laquelle s’étend à la fois ad extra et ad intra de la structure.

 

Dans cette ligne, là où le simple profit est placé au sommet de la culture d’une entreprise financière, ignorant les exigences liées au bien commun – c’est le cas aujourd’hui, même dans beaucoup de prestigieuses écoles de commerce (business schools) – toute instance éthique est de fait perçue comme extrinsèque et juxtaposée à l’activité entrepreneuriale. Cela est d’autant plus accentué par le fait que, dans leurs logiques organisationnelles, ceux qui ne correspondent pas aux objectifs de l’entreprise de ce type sont pénalisés à la fois au niveau de la rémunération qu’à celui de la reconnaissance professionnelle. Dans ces cas, le but du pur lucre crée facilement une logique perverse et sélective qui favorise souvent l’avancement au sommet de l’entreprise de sujets capables mais avides et peu scrupuleux dont l’action sociale est mue principalement par un gain personnel égoïste.

 

De telles logiques ont souvent poussé les structures dirigeantes (management) à mettre en œuvre des politiques économiques qui ne servent pas à stimuler la santé économique des entreprises, mais uniquement les profits des actionnaires (shareholders). Ceci porte ainsi préjudice aux intérêts légitimes de tous ceux qui, par leur travail et service, œuvrent au bénéfice de la même entreprise, sans oublier les consommateurs et les diverses communautés locales (stakeholders). Souvent motivées par des rémunérations énormes, proportionnées aux résultats immédiats de gestion, et non surtout contrebalancées par des pénalités équivalentes en cas d’échec des objectifs, ces mêmes logiques qui, à court terme, fournissent de gros gains aux managers et aux actionnaires, finissent ensuite par pousser à des prises de risque excessives et par laisser les entreprises débilitées et appauvries des ressources économiques qui leur auraient assuré de bonnes perspectives pour l’avenir.

 

Tout cela génère et diffuse facilement une culture profondément amorale au sein de laquelle, on n’hésite plus souvent à commettre de délit lorsque les avantages prévus dépassent les pénalités fixées. Cela affecte sérieusement la santé de tout le système économique et social, compromettant sa fonctionnalité et endommageant gravement la réalisation effective du bien commun sur lequel repose nécessairement toutes les formes de la vie sociale.

 

Il s’impose donc de manière urgente une autocritique sincère et une inversion de tendance, favorisant au contraire une culture entrepreneuriale et financière qui tienne compte de tous les facteurs qui constituent le bien commun. Cela signifie, par exemple, mettre clairement la personne humaine et la qualité des relations entre les personnes au centre de la culture d’entreprise, de sorte que chaque structure pratique une forme de responsabilité sociale qui n’est pas seulement occasionnelle ou marginale, mais qui la dirige et anime de l’intérieur toute action, en l’orientant au plan social.

 

La circularité naturelle qui existe justement entre le profit – facteur inhérent à tout système économique – et la responsabilité sociale – élément essentiel pour la survie de toute forme de coexistence civile – est appelée à manifester toute sa fécondité ; elle montre ainsi le lien indissoluble, que le péché tend à occulter, entre une éthique respectueuse des personnes et du bien commun et la fonctionnalité réelle de tout système économique et financier. Cette circularité vertueuse est favorisée, par exemple, en poursuivant une réduction du risque de conflit avec les stakeholders, comme aussi en encourageant une plus grande motivation intrinsèque des employés d’une entreprise.

 

Ici, la création de la valeur ajoutée, finalité principale du système économique et financier, doit montrer pleinement saviabilitédans le cadre d’un système éthique solide, précisément parce que fondé sur une recherche sincère du bien commun. Ce n’est que par la reconnaissance et la mise en œuvre du lien intrinsèque qui existe entre la motivation économique et la raison éthique que peut jaillir un bien qui est pour tous les hommes. Car, pour fonctionner correctement, le marché doit se baser sur des présupposés anthropologiques et éthiques qu’il n’est pas en mesure à lui seul de donner ou de produire.

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