MEDITATION SUR LE COMMANDEMENT NOUVEAU
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La Cène, Simon Ouchakov, école de Moscou, XVIIe siècle
Avant de réfléchir, d’une manière communautaire, sur cet Evangile de St Jean, il est souhaitable de le situer dans la vie du Christ.
La Bible de Jérusalem désigne ce passage sous le terme « Les Adieux ». Jésus est avec ses disciples pour le dernier repas. La Passion est déjà commencée puisque Judas poussé par Satan vient de sortir en tenant la bourse de la trahison: ‘ C’était la nuit ‘ indique l’Evangile.
S’adressant à ses disciples, il leur parle de son départ, dans un dernier entretien, il fait ses confidences à ses apôtres. Ses ultimes paroles sont enveloppées d’une atmosphère de gravité et de tendresse :
"Mes petits-enfants, c’est pour peu de temps que je suis encore avec vous. Vous me chercherez, et comme je l’ai dit aux Juifs : où je vais, vous ne pouvez venir, à vous je le dis à présent.
Je vous donne un commandement nouveau : vous aimer les uns les autres COMME JE VOUS AI AIMES, aimez-vous les uns les autres."
Si DIEU n’est qu’amour, il est pauvre, dépendant, humble. Au premier abord cela paraît impossible et pourtant il y a l'attitude de JESUS agenouillé devant ses apôtres avec un linge autour des reins, occupé à leur laver les pieds.
DIEU ne se révèle pas à nous comme l’Être Infini. Le DIEU en qui nous croyons n’est pas le Dieu des philosophes païens ; bien avant Jésus ils avaient prêché l’amour des autres, et même l’amour des ennemis. Ce qui en fait la ‘nouveauté‘ c’est que Jésus a redonné la première place, à ce commandement, tandis que les rabbins l’étouffaient dans le maquis des prescriptions de troisième et quatrième ordre. Et surtout il ajoute : "comme je vous ai aimés"‘.
C’est de Lui, JESUS, que vient le commandement de l’amour fraternel ; c’est encore lui qui est le modèle et la source de cet amour ; c’est enfin par cet amour que les chrétiens et les chrétiennes seront reconnus pour ses disciples.
Il s’agit d’un amour qui se modèle sur la manière de vivre de Jésus : commandement exigeant puisqu’il requiert une humilité et une volonté de service qui mènent à prendre la dernière place.
La manière de vivre de Jésus n’offre pas seulement un style, elle fonde aussi la possibilité de vivre pleinement l’amour fraternel.
Qu’est-ce que cet amour infini ? C’est un amour qui n’a pas de limite. Chacune et chacun d’entre nous se heurte à des limites dans son amour humain, dans ses amitiés humaines, mais l’amour du Christ, lui, est infini.
L’Amour est Don et Accueil.
Il ne s’agit pas d’être sentimental. Rabâcher le mot aimer finit par devenir ‘ bébête ‘
L’encyclique 'L’Amour dans la vérité‘ de Benoît XVI est d’une clarté remarquable sur ce sujet :
"Dépourvu de vérité, l’amour bascule dans le sentimentalisme. L’Amour devient une coque vide susceptible d’être arbitrairement remplie. C’est le risque mortifère qu’affronte l’Amour dans une culture sans vérité. Il est la proie des émotions et de l’opinion contingente des êtres humains ; il devient un terme galvaudé et déformé jusqu’à signifier son contraire. La vérité libère l’Amour des étroitesses de l’émotivité qui le prive de contenus rationnels et sociaux, et d’un fidéisme qui le prive d’un souffle humain et universel."
Lorsqu’un homme regarde son épouse, lorsqu’une femme regarde son époux avec ce regard d’amour où il n’y a que de l’amour, que peuvent-ils dire dire ? Quelle est la phrase qu’ils peuvent prononcer pour traduire ce regard d’amour ?
"Tu es tout pour moi, tu es toute ma joie." En regardant de très prêt, il s’agit bien d’une parole de pauvreté : si c’est toi qui est tout pour moi, moi je ne suis rien. Hors de toi, je suis pauvre.
Si cela est déjà vrai dans l’amour humain, o combien à plus forte raison quand il s’agit de Dieu en Jésus-Christ ! Dieu de la Pauvreté Absolue.
C’est en s’engageant sur cette voie de l’amour fraternel que la communauté des croyants sera reconnue comme celle des disciples de Jésus et qu’elle témoignera à tous les hommes de l’amour que Dieu leur porte.
En conclusion c’est encore à l’Encyclique ‘L’Amour dans la Vérité‘ de Benoît XVI que nous avons recours :
"L'’Amour de Dieu nous appelle à sortir de ce qui est limité et non définitif ; il nous donne le courage d’agir et de persévérer dans la recherche du bien de tous."
Cet engagement ne se réalise pas sans difficulté. Il ne va pas de soi.
Un adolescent disait à un Prêtre : "C’est formidable une religion qui demande une seule chose ‘aimer'. Il est formidable Jésus, de donner un seul commandement."
Après un silence, il fixe son regard sur le Prêtre et lui dit : " Vous le pratiquez, vous, le commandement de Jésus ?"
Et le Prêtre de lui répondre, ce que nous pouvons répondre chacune et chacun d’entre nous : "J’essaie !"