>

NOTRE FEUILLETON DE L'ETE : JESUS, LE DIEU DE MA VIE ! (4)

  Delfieux Tamanrasset

 

 

Les nouveaux nomades

 

 

 

Convergeant par la piste du nord, via Aïn Salah, celle de Djanet via Idilas, ou remontant d’Afrique noire par Agadez et Zinder, de plus en plus de gens affrontent pour venir ici, au cœur du plus grand désert de la terre, de moins en moins de difficultés.

 

Assekrem-caravane.jpgTouristes le plus souvent, pèlerins aussi parfois, gens de tous âges, de toutes opinions, de toutes nationalités obéissant aux motivations les plus diverses et soutenues par les finances les plus variées, foule hétéroclite, essentiellement occidentalisée, mais où se de plus en plus se mêlent Algériens et Maghrébins, arrivent sans crier gare, au hasard des heures du jour. Pratiquement de chaque jour.

 

Sans tapage, sans bruit.

 

Montés, et comme surpris de ces immensités, ils sont là, venus sachant très bien pourquoi ou ne le sachant pas. Formés en petit cercle qui a ses allures d’expédition, ou fondus dans un groupe sous bannière d’agence. Vieux rêveurs du désert ou néophytes candides jetés d’un seul coup d’aile au cœur du Sahara.  

 

Ils sont partis, avide de quitter une civilisation occidentale dont le bruit, l’anonymat, la course à l’argent, au plaisir, au prestige, les a comme saoulés. Lucides et droits dans leur critique, qui les conduit alors à un loyal affranchissement, mais, le plus souvent, toujours prisonniers d’un Occident qu’ils font suivre jusque dans le détail de la super-technique, recouvert du vernis du seul mépris intellectuel et verbal.  

 

Certains sont montés sans trop l’avoir prévu, pour fuir Tamanrasset où ils passaient, ce Katmandou de la Nouvelle Afrique. D’autres ne sont venus que pour cela, l’Assekrem étant l’unique but de leur projet.  

  désert

Ils sont venus, plus positivement, chercher par-delà ce paysage qui demeure peut-être le plus beau, en tout cas le plus insolite de la terre, un peu de silence, d’authenticité et de paix. Heureux de réaliser, ce jour, le rêve attendu depuis toujours.  

 

Parfois connaissant tout du frère Charles, souvent n’en sachant rien, mais toujours surpris, saisis et souvent remués en profondeur par ce désert et ces sommets où rien, décidemment, n’est comme ailleurs, avec ce quelque chose encore jamais vu, jamais senti, amenant les uns à prier, d’autres à pleurer, beaucoup à admirer et certains seulement à se taire.  

  charles_de_foucauld-oratoire.jpg

Le silence fréquemment les gagne alors. Le mur de l’oratoire recueille une prière. Un coin de rocher isolé, ce que l’on peut appeler une méditation, cependant que certains irréductibles, photomanes invétérés, restent rivés derrière leur objectif à travers quoi tout doit se contempler.  

 

assekrem3.jpgAu petit matin, presque chaque matin, l’Eucharistie en regroupe certains. La splendeur éblouissante de nombreux levers de soleil n’appelle-t-elle pas à rendre grâce ? Première messe parfois. Depuis longtemps, depuis toujours ? Qu’importe. De petites phrases griffonnées sans tricherie sur le grand cahier blanc témoignent d’un regard qui s’est éclairé, d’un cœur réchauffé, d’une âme que Dieu a touchée. De grands gaillards musclés avouent sans pudeur s’être sentis devenir meilleurs. D’autres qui, tout de go, se déclarent athées, veulent pendant une heure qu’on leur parle de Celui sans qui personne ne serait là.   

  charles de foucauld

La figure entrevue du frère Charles les retient, les intrigue. 

 

Le Christ de bronze reste pendu à sa pierre nue. Et l’Atakor flamboie. Et le désert se tait.  

 

On espérait le soleil, et voilà que c’est la brume ! Mais la brume parfois a d’étranges clartés.  

 

On attendait quelque chose. On ne sait trop quoi. Peut-être a-t-on trouvé Quelqu’un. Dans l’ineffable, il arrive que le désert, doucement, se mette comme à parler.  

 

Grâce indicible de l’Assekrem dont Dieu seul en finale est la source et peut apprécier la résonance dans le cœur de chacun.  

 

Grâce au-delà de tout romantisme ou du seul sentiment parce qu’elle s’adresse à l’être tout entier et se passe de mots.

 

Atakor.jpgGrâce de l’Assekrem où s’inscrit le souvenir d’un visage, l’authenticité d’une vie donnée, l’amour universel et un témoignage à l’Invisible.

 

Grâce de l’Assekrem parce que, sur cette terre nue où plus rien ne fait diversion, tout chante une Présence dont chacun trouve soudain en soi la nostalgie peut-être et, en tout cas, l’écho : « Si c’était vrai ? » Et tout ici, où l’on ne peut plus être distrait, dans le silence et la nudité, le désencombrement, dit que c’est vrai !

 

Grâce de ce lieu certainement soufflé par l’Esprit comme une vaste Bible ouverte où rien n’est écrit pourtant, parce qu’il est, lui aussi, tout à la fois, un Désert, une Montagne, une Ville et un Temple.

 

« Et ce temple, c’est vous. »  

 

 

Frère Pierre-Marie Delfieux   

"Sources Vives"

Delfieux     

 

 

 

A suivre dimanche prochain....

@paroissemartig © 2010 -  Hébergé par Overblog